Bulletin Octobre 2019 – Technologie – Industrie

La critique de la surexploitation des forêts russes à destination du marché chinois gagne en visibilité dans la presse russe.

Le journal Nezavisimaïa Gazeta (source RU) relève que de nombreuses pétitions visant l’exploitation non contrôlée des forêts russes, notamment dans l’Extrême-Orient, appellent le gouvernement fédéral à se saisir de cette question. Les exportations de bois russes vers la Chine représentent près de 3 milliards de dollars. Surtout, les mouvements citoyens et syndicats d’entreprises du secteur de la sylviculture soulèvent le problème de la déforestation illégale. La région du Lac Baïkal serait particulièrement touchée.

Le dialogue politique et économique russo-chinois intègre les échanges de matières premières tels que le bois. Cependant, ces critiques illustrent plusieurs éléments. Premièrement, la prégnance de la corruption dans l’économie russe ainsi que la difficulté pour le gouvernement central de développer des filières de transformation qui créeraient davantage de valeur ajoutée. Ensuite, cet épisode peut être perçu comme un exemple avant-coureur des dilemmes économique et écologique auxquels la Russie sera confrontée dans les années à venir. Son modèle économique repose sur l’exploitation et l’exportation de matières premières qui ne lui assurent pas une position favorable dans les chaînes de valeur mondiale, induisent des risques et dommages environnementaux conséquents et une dépendance économique vis-à-vis de certains partenaires commerciaux et aux investissements étrangers. Dans cette perspective, la gestion politique de cette question est un élément à surveiller.

Plusieurs corps militaires américains ont participé à l’Arctic Expeditionary Capabilities Exercise 2019 (AECE) au large de l’Alaska.

L’exercice militaire Arctic Expeditonary Capabilities Exercise (AECE) 2019 s’est déroulé au large des côtes de Californie et au sud de l’Alaska durant tout le mois de septembre (source EN). Il a regroupé près de 3 000 personnels de l’US Navy (3ème et 7ème flottes) et différents corps de Marine américains afin de tester les capacités logistiques expéditionnaires dans la région arctique. L’USS Somerset (PDL 25, navire de transport amphibie) et l’USS Comstock (LSD 45, navire de débarquement) y ont notamment participé. Dirigé par le Commandement indopacifique, il vise à préparer les troupes dépendant de ce commandement dans les domaines de la logistique, des contremesures de mines et des opérations amphibies par la validation des concepts opérationnels Littoral Operation in a Contested Environnement (LOCE) et Expeditionary Advanced Base Operations (EABO). Les exercices de contremesures de mines ont notamment permis d’éprouver les drones sous-marins en zone Arctique (source EN).

L’US Navy décentralise une structure de commandement de la Seconde Flotte américaine à Keflavik en Islande.

Un Surface Action Group (SAG) composé des destroyers lance-missiles USS Lassen et USS Forrest Sherman, du destroyer USS Farragut, du croiseur USS Normandy a été envoyé en Islande où la Seconde Flotte américaine a installé un quartier général temporaire en relation avec celui de Norfolk (Source EN et Source EN). Cependant, le porte-avions USS Harry S. Truman, déployé au-delà du cercle polaire arctique durant l’exercice Trident Juncture au large de la péninsule scandinave en 2018, ne fait pas partie du contingent du fait de problèmes électriques. Cette absence renforce l’importance du HQ terrestre islandais, qui se compose de trente personnels, pour les différents exercices militaires et missions de surveillance sous-marine conduites par les P‑8 américains dans la zone. De manière générale, cette capacité de déploiement s’explique par l’appui apporté par la Seconde Flotte américaine à la Sixième Flotte basée à Naples (Italie) et illustre le rôle à venir de l’US Navy dans l’espace Atlantique après la réactivation de la Seconde Flotte (source EN).

FOCUS : La base aérienne de Thule demeure toujours plus stratégique
pour les États-Unis.

Autorisée par le gouvernement danois en exil en 1941, l’installation d’une base militaire américaine à Thule, au nord du Groenland, a été rendue publique en 1952 (source EN). Sa position géographique en avait fait une clé de voûte dans la posture de dissuasion et de défense des États-Unis durant la Guerre froide.

Elle accueille aujourd’hui près de six cents personnels militaires et civils américains, danois et groenlandais. Le groupe aérien 821 opère depuis cette base et est commandé par la base de l’armée de l’Air américaine de Peterson (Colorado) qui traite de la surveillance spatiale, l’alerte antimissile et le contrôle de l’espace aérien du North American Aerospace Defense Command et de l’Air Force Space Command. le premier détachement du 23ème escadron des opérations spatiales l’utilise également pour des activités de communication, de surveillance et de contrôle des satellites américains par le biais d’outils de télémétrie, de traçage et d’opérations de C2 (Command and Control). Le 12ème escadron d’alerte spatiale a la responsabilité du système d’alerte de missiles balistiques sur l’Amérique du Nord et la surveillance des objets spatiaux à proximité de la Terre. L’infrastructure se compose notamment du radar AN/FPS‑120 de Raytheon. Le site accueille également les exercices canado-américains Vigilant Shield.

La flotte du Nord a conduit un exercice amphibie au sud de l’archipel de Terre du Nord (Severnaya Zemlya) en amont de l’exercice militaire Tsentr-2019 (source EN et source EN).

La projection de 500 personnels militaires sur cet archipel reculé, à la rencontre de la mer de Kara et de la mer de Laptev, est significative dans la mesure où cette zone demeure toujours difficile d’accès puisque située à 78 degrés de latitude nord et dans un détroit dont l’accessibilité demeure limitée même en saison estivale et sur la RMN en direction de l’Est.

En parallèle, la Russie s’apprête à construire un radar à l’extrémité nord de la péninsule de Taymyr dans le détroit de Vilkitsk entre les mers de Kara et Laptev (Source EN). Cette infrastructure identifiée comme militaire sera à la charge de l’autorité fédérale du développement des frontières pour un montant de dix-sept millions d’euros (1,2 milliard de roubles). La durée de construction est de trente-trois mois. Cette localisation accueillait déjà une station météorologique ainsi qu’un héliport pour les aéronefs militaires.

Un rapport de l’Association des ports maritimes russes souligne la forte croissance du trafic des infrastructures portuaires le long de la Route Maritime du Nord.

Les principaux hubs concernés par cette dynamique sont les ports de Sabetta, qui – avec un trafic pour les huit premiers mois de 2019 de 18,4 millions de tonnes de biens – voit son trafic augmenter de 100%, les ports de Mourmansk (60,7 millions de tonnes sur la même période) avec une augmentation de 18,1% (source EN et source RU). Entre janvier et août 2019, près de 69,8 millions de tonnes de matériels ont transité dans les eaux septentrionales russes. Si ces chiffres illustrent l’effort économique et matériel réalisé par la Russie pour développer le littoral arctique russe, le périmètre de ce rapport est différent du flux de marchandises transitant par la RMN.

La Norvège lance l’acquisition de navires pour les activités de ses garde-côtes en Arctique.

Les garde-côtes norvégiens ont choisi l’entreprise Vestdavit (Norvège) pour la construction et la fourniture de trois navires équipés pour la navigation en condition polaire (Source EN). Ils seront livrés respectivement pour 2022, 2023 et 2024, et respecteront les normes du code polaire s’agissant des conditions de navigation polaire hivernale. Cette date de livraison correspond aux échéances ambitieuses des projets énergétiques russes en matière d’exportation de gaz naturel liquéfié (GNL).

 

Fabien Carlet (IRIS)