Bulletin Juillet 2020 – Technologie – Industrie – Capacitaire

Actualité Industrielle

La crise du COVID‑19 impacte l’économie russe dans l’Arctique

Le monde industriel russe continue de souffrir des effets du COVID‑19, notamment dans le Grand Nord et au sein de l’oblast de Mourmansk. Or, ces nouvelles sont inquiétantes pour l’économie russe, dépendante des exploitations énergétiques installées dans l’Arctique et qui requièrent la mobilisation dans des environnements déjà contraints de personnels qualifiés. La disponibilité – ou non – de ces derniers impacte largement la capacité d’entreprises comme Novatek ou Rosatom à mener à bien leurs principaux projets infrastructurels. Plus indirectement, la dégradation de la situation dans l’oblast de Mourmansk fait aussi peser des risques importants sur la Marine russe, la Flotte du Nord y étant basée. Pour maintenir les pleines capacités opérationnelles des équipages, la Russie doit, sur le modèle de plusieurs pays occidentaux, procéder à la mise en quarantaine de nombreux personnels, au risque de voir le virus se répandre au sein d’équipages déployés au large du pays. Sources : The Barents Observer, The Barents Observer

Les États-Unis souhaiteraient se doter de nouveaux brise-glaces

Alors que les États-Unis semblent de plus en plus attentifs à la remilitarisation de l’Arctique et aux efforts consentis par la Russie pour y développer ses capacités militaires, les autorités américaines annoncent vouloir accélérer le développement de brise-glaces et considèrent même l’acquisition de modèles dotés d’une propulsion nucléaire. Ces unités possèdent, par rapport à leurs homologues à propulsion conventionnelle, des avantages et des inconvénients évidents : dotés d’une meilleure autonomie, les brise-glaces nucléaires possèdent une motorisation plus puissante, synonyme dans l’Arctique d’une capacité à affronter des glaces plus épaisses, et par conséquent d’une mobilité accrue. Ils sont néanmoins plus coûteux et requièrent l’intervention de personnels davantage qualifiés à la fois lors de la conception, de la production, de l’opération et de l’entretien des matériels ; par ailleurs, ils posent des risques environnementaux plus importants, en particulier en cas d’accident.

Cette initiative américaine, comprise dans le document « Memorandum on Safeguarding U.S. National Interests in the Arctic and Antarctic Regions », correspond à un constat sans appel : dans le domaine des brise-glaces, les États-Unis accusent – comme l’Europe – un retard important et affiche même un réel déficit capacitaire, avec, selon le Monde Diplomatique, trois brise-glaces moyens et deux légers contre quatre lourds, trente-et-un moyens et seize légers pour la Russie. En accélérant sa production de brise-glaces, Washington pourrait espérer réduire cet écart, sans toutefois rattraper la flotte d’une Russie devant composer avec une façade Arctique bien plus importante. Sources : High North News, Le Monde Diplomatique, Memorandum on Safeguarding U.S. National Interests in the Arctic and Antarctic Regions

Actualité Capacitaire

La Russie poursuit le développement de ses capacités sous-marines

L’admission au service actif d’un premier sous-marin de classe Boreï-A, le Knyaz Vladimir, est un événement significatif pour la Marine russe. Le Knyaz Vladimir est le premier navire de classe Boreï-A, que les analystes distinguent de la classe Boreï. Le développement de cette dernière avait été perturbé par la chute de l’URSS et son impact sur le secteur de la construction navale russe. En ce sens, l’admission au service actif du Boreï-A, trois ans après son lancement à la mer, symbolise le renouveau de la sous-marinade russe, six unités supplémentaires étant prévues en plus des trois sous-marins de classe Boreï déjà actifs : le Knyaz Vladimir est donc le premier sous-marin nucléaire stratégique construit en Russie depuis la disparition de l’Union Soviétique.

Sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de classe Boreï et Boreï-A

Bâtiment Tonnage Classe Lancement Admission au service actif État
St. Petersburg 13,000 Boreï 2008 2012 En service
Alexandr Nevskiy 13,000 Boreï 2010 2013 En service
Vladimir Monomakh 13,000 Boreï 2012 2014 En service
Knyaz Vladimir 14,500 Boreï-A 2017 2020 En service
Knyaz Oleg 14,500 Boreï-A x 2020 Sur cale
Generallisimus Suvorov 14,500 Boreï-A x 2020 Sur cale
Imperator Alexandr III 14,500 Boreï-A 2019 2020 Sur cale
Knyaz Pozharskiy 14,500 Boreï-A 2020 2021 Commande à venir
Ryurik 14,500 Boreï-A x 2026 Commande à venir
x 14,500 Boreï-A x 2027 x

Données grises : projections officielles

Censés succéder aux SNLE de classe Delta I et IV ainsi qu’aux Typhoon de construction plus récente, les sous-marins de classes Boreï et Boreï-A seront équipés de missiles nucléaires RSM‑56 Bulava après l’échec du développement des R‑39UTTkh Bark. Sources : Red Samovar, Russian Ships Info, Défense et Sécurité Internationale, RIA Novosti (RU)

La Flotte du Nord russe s’exerce à la lutte anti-sous-marine (ASM)

Territoire propice aux déploiements de sous-marins, l’Arctique voit se multiplier ces dernières années les exercices militaires dédiés au perfectionnement de la lutte anti-sous-marine (ASM/ASW). Dernière en date à s’exercer, la Flotte du Nord russe participait aux alentours du 9 juin 2020, et dans le sillage du déploiement par la France de la FREMM Normandie en mer de Barents, à un exercice de lutte ASM de dimensions réduites, organisé autour des corvettes de classe Grisha (Projet 1124M) Yunga et Snezhnogorsk et d’un appareil de patrouille maritime (PATMAR) ‘Iliouchine’ Il‑38. La composition de cette escadre est révélatrice de l’état des forces navales russes qui, tout en procédant aux lancements d’unités modernes et bien armées, doivent encore composer avec des bâtiments vieillissants, les navires du Projet 1124M ayant été lancés entre 1989 et 1994 sur la base d’un design remontant à 1970. Source : Navy Recognition

Les forces aériennes américaines et norvégiennes s’exercent dans l’Arctique

Près d’un mois après le déploiement remarqué d’un bombardier stratégique B‑1 dans l’espace aérien suédois (cf. bulletin n°13), les forces armées américaines ont dépêché dans l’Arctique un bombardier B‑2, rejoint par deux F‑35 de l’armée de l’Air norvégienne. Cette fois encore, le message est évident et doit être compris dans un contexte marqué, entre autres, par la croissance des activités militaires russes dans la région, mais aussi dans l’Atlantique Nord : en déployant un système d’armes aussi létal et coûteux, les États-Unis cherchent à illustrer leur intérêt pour la région, à rassurer leurs partenaires et alliés locaux, mais aussi à répondre aux déploiements similaires par la Russie d’appareils et de navires militaires. Source : The Barents Observer

La Suède cherche à préserver ses capacités opérationnelles

Directement concernée par la croissance des capacités militaires russes dans l’Arctique et dans la Baltique, la Suède cherche à préserver ses capacités opérationnelles malgré des dépenses limitées dans le domaine de la défense. Pour maintenir leurs capacités de réaction – on parle aussi d’operational readiness –, les forces armées suédoises se livrent à des exercices réguliers, à l’image de l’exercice annuel de lutte anti-sous-marine (ASM) « ASWEX ». La Suède doit néanmoins composer avec les effets de la crise du COVID‑19, limitant les mouvements des personnels, en particulier dans le domaine maritime. Elle a ainsi renoncé à l’exercice interarmes « Aurora », initialement prévu pour durer quatre semaines en mai et finalement repoussé. Ces exercices contribuent aussi à réaffirmer l’importance des armées suédoises auprès de leurs partenaires et alliés occidentaux, eux aussi de plus en plus actifs dans l’Arctique et dans l’Atlantique Nord. Source : Janes

 

IRIS