Inde

Plus familiarisé avec les problématiques des milieux naturels subtropicaux, New Delhi n’entend pas pour autant se tenir à l’écart des enjeux relatifs au cercle polaire. Acteur du débat normatif au sein des instances internationales, l’Inde visualise que le devenir de la zone arctique l’affectera. Aspirant à développer une vision planétaire, elle ne peut être absente d’une partie du globe où d’autres puissances sont présentes. À ce titre, elle a été admise en mai 2013 au sein du Conseil de l’Arctique avec le statut d’observateur. L’Inde est un des dix pays possédant depuis juillet 2008 une station de recherche (Himadri) à Ny-Alesund dans l’archipel norvégien de Svalbard. Elle peut légitimement revendiquer une expertise sur les questions polaires acquise dans l’Antarc­tique avec les trois stations permanentes de Dakshin Gangotri, Maitri et Bharati, établies respectivement en 1983, 1989 et 2012. Une présence qui lui valut d’être reconnue comme membre du traité de l’An­tarctique le 19 août 1983 et de participer à diverses commissions scientifiques sur l’Antarctique, ou encore d’être membre fondateur du forum asiatique pour les sciences polaires.

L’éloignement géographique fait que l’Inde est moins concernée que les autres membres asiatiques du Conseil de l’Arctique (Chine, Corée du Sud, Japon, Singapour) par les bénéfices commerciaux pouvant être tirés de l’ouverture de nouvelles voies maritimes dans le Grand Nord et par la perspective d’exploitation des ressources énergétiques. Cependant des entreprises indiennes du secteur des hydrocarbures pourraient manifester un intérêt pour des projets d’exploration et de production dans l’Arcti­que et en Sibérie Orientale en partenariat avec des sociétés russes.

Le gouvernement indien ne peut ignorer les retombées qu’engendrerait le développement d’activités économiques sur un espace déjà fragilisé par la hausse des températures. L’augmentation du niveau des mers liée au dégel de la calotte glaciaire et l’amplification du réchauffement climatique découlant du relargage de méthane dans les zones arctiques sont sujets d’inquiétude pour un pays aux zones littorales densément peuplées et possédant une agriculture largement dépendante d’un régime de moussons susceptible d’être affecté par la modification de la circulation atmosphérique alors qu’on observe par ailleurs un recul des glaciers himalayens. La lente fonte du permafrost dans l’Arctique est un phénomène également constaté sur le plateau tibétain d’où sont originaires les grands fleuves indiens.

Enfin, pour un gouvernement nationaliste hindou prompt à faire appel à des références mythologiques hindoues pour asseoir son action, Gangadhar Tilak (1856-1920), un des leaders du mouvement pour l’indépendance au tournant du XXème siècle, offre un argumentaire. Sa relecture des textes védiques l’avait conduit à écrire « The Arctic Home in the Vedas », publié en 1903, dans lequel il conclut que les premiers Aryens vivaient au Pôle Nord à une période interglaciaire avant de migrer lors du dernier âge glaciaire pour s’installer notamment dans le sous-continent indien.