Bulletin Janvier 2020 – Amérique du Nord – Groenland/Danemark – Islande

ÉTATS-UNIS

Un mémorandum présidentiel demande une meilleure cartographie
de la zone économique exclusive (ZEE) et du littoral de l’Alaska

Un mémorandum présidentiel du 19 novembre 2019 appelle à une meilleure cartographie des eaux arctiques et subarctiques de la ZEE et du littoral de l’Alaska pour faciliter l’extraction minière et d’autres activités commerciales dans ces eaux nordiques. Cet effort cartographique est déjà effectué depuis 2010 au sein de l’Arctic Regional Hydrographic Commission.

Le 19 novembre 2019, un mémorandum présidentiel lié à l’Alaska a été publié. Dans ce document, Donald J. Trump souligne le manque d’informations cartographiques disponibles pour l’Alaska. Or, « les activités de commerce maritime, la production nationale de fruits de mer, la pêche saine et durable, la résilience côtière, la production d’énergie, le tourisme et les loisirs, la protection de l’environnement, la sécurité nationale et d’autres intérêts » contribuent pour plus de 300 milliards de dollars par an à l’activité économique, représentant 3 millions d’emplois et 129 milliards de dollars de salaires (section 1 du mémorandum du 19 novembre 2019). Afin de faciliter l’extraction minière et les activités de l’Alaska, l’administrateur de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), en coordination avec l’État de l’Alaska et le Comité exécutif de la cartographie de l’Alaska, devra élaborer une stratégie spécifique dans les 180 jours suivant ce mémorandum (section 3 du mémorandum du 19 novembre 2019). Il est important de souligner que cet effort de cartographie a déjà débuté en 2010, avec le lancement de l’Arctic Regional Hydrographic Commission (ARHC) par les cinq États côtiers de l’océan Arctique. Depuis cette date, la NOAA conduit des expéditions de cartographie ; malgré ces efforts, seuls 4,1% des eaux de l’Arctique américain étaient cartographiées début 2018.

En parallèle, l’armée américaine a effectué, en accord avec le Danemark, des survols du Groenland afin d’évaluer le potentiel minier de l’île.

L’Administration nationale des océans et de l’atmosphère – ou National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) – a publié sa “Arctic Report Card” annuelle

Cette Arctic Report Card de 2019 confirme les risques liés au changement climatique pour les écosystèmes et les communautés arctiques.

Lancée en 2006, l’Arctic Report Card est une publication scientifique à comité de lecture qui fait le point annuel sur l’état actuel des différentes composantes du système environnemental de l’Arctique. L’Arctic Report Card de 2019 indique que « les écosystèmes et les communautés de l’Arctique sont de plus en plus menacés en raison du réchauffement continu et du déclin de la glace de mer ». Parmi ces observations, l’Arctic Report Card 2019 note notamment une augmentation de la température de l’air et de la mer de surface, l’accélération du dégel du pergélisol, un verdissement de la toundra, une baisse de la couverture neigeuse en Amérique du Nord, une diminution de la calotte glacière et de la banquise.

Les risques climatiques touchant la région de la mer de Béring au coeur de deux publications

Les récentes publications soulignent les risques climatiques pour les communautés du Nord et l’écosystème de la région de la mer de Béring.

Deux récentes publications américaines soulignent les risques climatiques rencontrés par la région de la mer de Béring. L’Arctic Report Card 2019 évoquée ci-avant identifie cette région comme une des plus touchées. Les températures des fonds marins de la côte nord de la mer de Béring ont ainsi dépassé les 4°C en novembre 2018 – une première selon l’Arctic Report Card 2019. Un article du Bulletin of the American Meteorological Society de janvier 2020 souligne lui aussi les changements rapides de cette région. En examinant les données liées à l’étendue de la glace de mer de la région depuis 1850, et en les comparant à leurs données relevées entre janvier et avril 2018, les auteurs relèvent que cette étendue a atteint son niveau historique le plus bas en 2018. Ces résultats indiquent un changement très rapide de l’ensemble de l’écosystème du nord de la mer de Béring. A titre d’exemple, le village Yupik de Newtok a dû déménager en octobre 2019 ; ses habitants sont les premiers migrants environnementaux d’Amérique du Nord.

CANADA

Retards et augmentation des prix après la fusion des deux compagnies aériennes Inuit desservant le Nunavut

Depuis le 1er novembre 2019, les deux seules compagnies aériennes Inuit desservant le Nunavut, Canadian North et First Air, ont fusionné en gardant le nom de la première. Cette fusion fait craindre une dégradation de l’offre de service, augmentant potentiellement les délais de livraisons du fret et les prix.

Acceptée en juin 2019 par le gouvernement fédéral, cette fusion des deux compagnies canadiennes détenues par Makivik Corporation et l’Inuvialuit Regional Corporation semble déjà avoir certains effets néfastes. En effet, la chambre de commerce de la région de Kitikmeot a fait part de ses inquiétudes en qualifiant la situation du transport de fret « au mieux d’horrible » (horrific at best). Elle note des livraisons plus lentes du courrier mais aussi de denrées périssables ; des délais allongés pour certains clients d’une à deux semaines (sur des délais qui étaient déjà de deux semaines). Par ailleurs, au 1er janvier 2020 selon la nouvelle grille tarifaire, les passagers utilisant des routes fréquemment empruntées sur les lignes de la nouvelle compagnie devront payer plus chers leurs sièges. Suite à la fusion, il n’est donc plus possible de faire jouer la concurrence. Certaines communautés ont comme seule option la nouvelle (et unique) compagnie Canadian North, alors même que les communautés du Nunavut sont accessibles uniquement par avion en hiver. Sources : CBC, Nunavut News, Nunatsiaq.

L’Arctique canadien en première ligne des effets du changement climatique

Une étude sur le dégel du pergélisol dans deux Territoires du Nord et un récent rapport du GIEC prévoient des événements climatiques plus violents et des effets dramatiques pour l’Arctique canadien, région qui a atteint un nouveau record de niveau bas des glaces, battant celui de 2012 en octobre 2019.

Selon Gilles Langis, du service météorologique du Canada, la période d’eau libre aurait reculé de près d’un mois à certains endroits de l’Arctique canadien. Les Inuits, quant à eux, rapportent également que la saison des glaces est très variable d’une année à l’autre. Ainsi, ils observent qu’à la même époque l’année dernière, ils se déplaçaient en motoneige, alors que cette année, ils prennent leurs bateaux. Selon une étude publiée dans Nature Climate Change, le dégel du pergélisol dans les territoires du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest (TNO) entraîne un accroissement du risque de feux, auparavant limités par les sols gelés. Cette accélération du dégel du pergélisol peut également augmenter le risque d’inondations pendant la débâcle, de pluies plus fortes, le risque de foudre et d’étés moins humides. Enfin, cette accélération peut affecter très fortement les infrastructures telles que les routes, les bâtiments et les pipelines mais aussi les câbles de fibre optique terrestres. Cette étude présente également un résultat nouveau : ces événements climatiques et leurs conséquences pourraient arriver plus vite qu’escompté dans l’Arctique canadien. En parallèle, le dernier rapport du GIEC sur les océans et la cryosphère qualifie de dramatiques et sévères les effets du changement climatique pour les régions montagneuses et arctique du Canada. Sources : Eye on the Arctic, Nature, National Observer, IPCC.

Une Ambassadrice canadienne spécialiste de l’Arctique nommée en Russie

Une ancienne représentante du Canada au Conseil de l’Arctique (SAO Chair) a été nommée au poste d’Ambassadrice à Moscou, envoyant ainsi un signe en direction de la Russie notamment sur les questions arctiques.

Alison LeClaire a été nommée Ambassadrice canadienne à Moscou par la ministre des Affaires étrangères canadienne Chrystia Freeland. Cette diplomate de carrière qui occupe ici son premier poste d’ambassadrice, a des liens avec la Russie et les pays d’Europe de l’Est, mais également avec l’Arctique. Alison LeClaire était depuis 2016 Senior Arctic Official pour le Canada au Conseil de l’Arctique et directrice du département pour les affaires de l’Arctique, l’Eurasie et l’Europe pour Affaires mondiales Canada. Pour le Professeur Michael Byers, cette nomination envoie un signal positif à la Russie pour le maintien de bonnes relations de coopération, notamment sur les questions arctiques. Sources : Canada.ca, Linkedin.

Tourisme et croissance économique au beau fixe dans les Territoires
du Nord-Ouest et au Nunavut

Le tourisme dans les Territoires du Nord-Ouest (TNO) se porte bien grâce aux visiteurs canadiens et chinois. Au Nunavut, la croissance est tirée vers le haut par le secteur minier et de la construction.

Depuis cinq ans, les chiffres du tourisme dans les TNO ne cessent d’augmenter, notamment grâce aux touristes chinois (+421% en cinq ans) et coréens (+142%) qui viennent observer les aurores boréales. Entre avril 2018 et mars 2019, 120 000 touristes (dont 81 000 Canadiens et 19 000 Chinois) ont visité les TNO soit une augmentation de 7% par rapport à l’année d’avant. Ces touristes auraient dépensé 210 millions de dollars sur cette même période, selon des chiffres publiés en novembre 2019 lors d’une conférence sur le tourisme à Yellowknife. Par ailleurs, selon des données publiées en novembre 2019 par Statistiques Canada, la croissance du PIB de 2018 a été la plus forte au Nunavut avec +7,6% contre 3,2% au Yukon et de 1,6% dans les Territoires du Nord-Ouest. Cette forte croissance économique au Nunavut s’expliquerait par de nombreux investissements dans des projets miniers (Mines d’or de Meliadine et Amaruq) et des projets de construction (Collège de l’Arctique et poste de ravitaillement de Nanisivik). Sources : Eye on the Arctic, Regard sur l’Arctique.

ISLANDE

Restriction à l’utilisation de fiouls lourds dans les eaux territoriales et intérieures à partir du 1er janvier 2020

Le ministère de l’Environnement et des Ressources naturelles a annoncé que la teneur en soufre autorisée pour les combustibles marins sera abaissée de 3,5% à 0,1% à compter du 1er janvier 2020.

Cette mesure de restriction a été décidée en application de l’annexe VI de la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (MARPOL). Ainsi, les eaux territoriales islandaises seront considérées comme des zones de contrôle des émissions au sens de la convention MARPOL. Pour les navires ayant déjà leurs réservoirs remplis, l’application de cette règle prendra effet au 1er septembre 2020 ; ils seront dans l’obligation de signaler à l’Agence pour l’environnement d’Islande la quantité de fiouls lourds qui leur restent. Les associations de défense de l’environnement Iceland Nature and Conservation Association et Clean Arctic Alliance (dont WWF et Greenpeace sont membres), qui avaient fait campagne pour une interdiction juridiquement contraignante des fiouls lourds dans les eaux arctiques à partir de 2020, ont accueilli très favorablement cette initiative islandaise.

Lancement d’une nouvelle carte interactive pour l’amélioration de la sécurité des voyageurs en Islande

Une nouvelle carte interactive, disponible sur le site Safetravel.is, a été lancée afin d’améliorer la sécurité des déplacements en Islande.

Lancée fin novembre 2019, Safetravel.is est une nouvelle carte interactive développée afin de renforcer les déplacements des voyageurs. Elle combine les informations de trois cartes déjà existantes (vedur.is, vegagerdin.is et safetravel.is) et permet de voir en temps réel les conditions météorologiques, les conditions routières, et les conditions dans les attractions touristiques, mais également les rafales de vent sur les routes, les risques d’avalanche, etc. Cette carte a été développée en collaboration entre le ministère du Tourisme, de l’Industrie et de l’Innovation d’Islande, l’Association islandaise de recherche et de sauvetage (ICE-SAR) et l’assurance Sjóvá-Almennar.

Jean-Paul Vanderlinden (CEARC), Magali Vullierme (CEARC), Michael Delaunay (CEARC)