Bulletin Septembre 2019 – Amérique du Nord – Groenland/Danemark – Islande

ÉTATS-UNIS

L’annulation de la visite officielle au Danemark de Donald Trump prévue en septembre a surpris aux États-Unis comme à l’étranger

Après avoir confirmé sa volonté d’acheter le Groenland, Trump annule sa visite officielle prévue dans le Royaume du Danemark début septembre

Le 18 août, le Président Trump a confirmé sa volonté de faire une « grosse transaction immobilière » en achetant le Groenland, tout en précisant que ce rachat n’était pas une priorité pour les États-Unis. D. Trump a motivé cette volonté en indiquant que le Groenland « faisait beaucoup de mal au Danemark » puisque le Royaume perdrait presque 700 millions de dollars par an en aidant le Groenland. Ce rachat, qui serait « nice », permettrait donc de protéger le Danemark, grand allié des États-Unis. Suite au refus catégorique de Danemark – qui rappelle que le Groenland est un territoire autonome – D. Trump a annoncé sur Twitter, le 20 août, que sa visite officielle prévue au Danemark en septembre sera « repoussée à plus tard ». Cette annulation a surpris aux États-Unis. Certains ont souligné qu’ils pensaient que cette visite devait porter sur d’autres sujet que le “rachat” du Groenland ; elle a également pris de cours l’Ambassadrice américaine auprès du Danemark, qui annonçait quelques heures avant le twitt de D. Trump, que le Danemark était prêt pour la visite présidentielle. Cette annulation a profondément choqué le gouvernement et la couronne danoise (voir la partie Groenland).

Le NORAD a intercepté deux bombardiers russes qui survolaient la mer de Beaufort

Deux bombardiers russes TU-95 Bear survolant la mer de Beaufort ont été interceptés par le NORAD

Le 8 août 2019, le NORAD a annoncé avoir intercepté deux bombardiers russes TU-95 Bear survolant les zones d’identification de défense aérienne de l’Alaska et du Canada. Les avions seraient restés dans l’espace aérien international de la mer de Beaufort – et n’ont pas pénétré dans l’espace aérien souverain des États-Unis ou du Canada. Les interceptions d’avions sont très fréquentes dans l’Arctique.

CANADA

Les Forces armées canadiennes surveillent le Passage du Nord-Ouest (PNO) depuis Cambridge Bay

Les Forces armées canadiennes lancent une opération de surveillance aérienne le long du PNO, dans un contexte de remise en question de la souveraineté canadienne sur le Passage par l’administration Trump.

L’opération Nanook 19 s’est déroulée du 11 au 30 août 2019 sous la direction du Major Gabriel Martin-Benoit. Le long du Passage du Nord-Ouest (PNO), entre Cambridge Bay et Pond Inlet, les Forces armées canadiennes ont mené des exercices de surveillance aérienne pour identifier des navires ne s’étant pas signalés aux autorités canadiennes. Cet exercice a été mené dans un contexte diplomatique particulier – le secrétaire d’État américain Mike Pompeo ayant qualifié la souveraineté canadienne sur le PNO d’ »illégitime » (cf. bulletin numéro 1) – et une présence plus grande de navires (notamment de tourisme et de loisir) dans le passage. Cette opération comportait également un entraînement au sauvetage de personnes blessées (Source : Nunatsiaq).

Nouvelles annonces de financements fédéraux pour des projets d’infrastructures de transport

Le ministre des Transports, Marc Garneau, a annoncé lors de son déplacement à Iqaluit une série de financements dans les infrastructures de transport – notamment routier – pour favoriser l’accès aux ressources minières et le développement de mines.

Lors de sa venue à Iqaluit les 13 et 14 août 2019, le ministre des Transports Marc Garneau a annoncé une série de financements dans le domaine des infrastructures de transport. Ces financements concernent tout d’abord des études avant travaux (41,5 millions de dollars) pour une route toute-saisons de 640 km (dont la construction est évaluée à 1,6 mil­liard de dollars). Cette route, le “Slave Geological Province Corridor”, traversera les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut pour relier deux zones riches en minéraux (notamment en diamants) où trois mines sont déjà actives. Le projet doit également relier le port de Grays Bay donnant sur l’Arctique, dans le but de faciliter l’accès aux ressources minières et permettre la mise en exploitation de neuf sites miniers supplémentaires (Source : ICI Radio Canada, Gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, Nunavut News). Grise Fiord et Resolute Bay vont bénéficier de 76,5 millions de dollars sur sept ans du gouvernement fédéral pour développer leurs ports (Source : Nunavut News). Enfin, Rankin Inlet va recevoir 45,5 millions de dollars du gouvernement fédéral pour étendre ses infrastructures aéroportuaires (Source : NNSL).

Le gouvernement fédéral continue sa politique de réconciliation envers les populations Inuit

Le gouvernement fédéral présente les troisièmes excuses officielles de l’année pour le traitement fait aux Inuit, annonce la création d’une nouvelle aire marine protégée et signe une entente allant vers un accord de dévolution de responsabilités sur les terres au Nunavut.

Le 14 août 2019, la ministre des Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord, Carolyn Bennett, a présenté les excuses du gouvernement fédéral aux Inuits de la région de Qikiqtani (Nunavut) pour les pratiques coloniales imposées à ces populations entre 1950 et 1975 – relocations forcées et abattages de chiens de traineaux. La ministre a reconnu que le gouvernement fédéral a failli : « We failed to provide you with proper housing, adequate medical care, education, economic viability and jobs. » Ces excuses s’accompagnent d’un financement fédéral de 20 millions de dollars pour des programmes de réparations. C’est la troisième fois cette année que le gouvernement fédéral présente des excuses aux Inuits pour le traitement fait aux populations Inuit. Cela traduit à nouveau la réelle volonté du Premier ministre Trudeau d’engager un processus de réconciliation avec les populations Inuit (Source : Nunatsiaq, Eye on the Arctic).

Le 15 août 2019, la ministre a signé une entente de principe portant sur un possible transfert, dans les cinq ans, de responsabilités concernant la gestion des terres et des ressources au Gouvernement du Nunavut. Cette entente ouvre la possibilité à une plus grande autonomie des populations Inuit en leur permettant de bénéficier directement des retombées économiques liées à la mise en valeur des ressources. Des accords similaires ont déjà été signés en 2003 et 2014 pour le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest (Source : Regard sur l’Arctique).

Enfin, le Premier ministre Justin Trudeau était à Iqaluit début août pour annoncer la mise en place d’une aire marine protégée dans le Détroit de Lancaster, accompagnée d’un financement de 55 millions de dollars pour les communautés concernées. Lors de cette annonce, un porte-parole du Premier ministre a souligné le fait que la création d’aires protégées dans le PNO renforce la revendication canadienne sur le Passage (Sources : Eye on the Arctic).

GROENLAND/DANEMARK

Renforcement de la présence militaire danoise en Arctique

La ministre de la Défense danoise identifie les tensions en Arctique comme une des cinq menaces principales pour le Danemark.

Trine Bramsen, ministre danoise de la Défense, a annoncé un renforcement de la présence danoise en Arctique. Les tensions en Arctique sont identifiées comme une des cinq menaces principales qui pèse sur le Danemark. Les autres menaces identifiées sont : une Russie « agressive », le risque de cyber agression, les flux de migrants non contrôlés et le changement climatique. Ce renforcement, dont la nature reste à préciser, s’inscrit dans un maintien constant du budget du ministère de la Défense. (Sources : Jyllands-Posten, 19 août 2019)

Donald Trump exprime le souhait d’acheter le Groenland et annule ensuite une visite d’État au Danemark

Cumulant les impairs, Donald Trump envisage le rachat du Groenland, puis, suite aux réactions danoises, annule une visite d’État.

Qualifiée d’absurde par les médias et les politiciens danois et groenlandais, l’idée du rachat du Groenland par les États-Unis a été reçue soit avec humour, soit avec beaucoup de froideur. Dans la foulée, Donald Trump a annoncé l’annulation de la visite d’État prévue début septembre. Cette annulation a été jugée comme insultante pour la couronne danoise par de nombreux observateurs et politiciens locaux. Le fait d’envisager un « achat », s’il est absurde, s’inscrit dans un intérêt croissant des grandes économies mondiales pour les ressources groenlandaises. (Sources : le Monde, 16 août 2019, SERMITSIAQ-AG 19 août 2019, le Monde, 19 août 2019, SERMITSIAQ-AG, 21 août 2019, Reuters via The Guardian, 21 août 2019)

La “Bank of Greenland” (GrondlansBANKEN) passe un cap en matière de capitaux propres.

La Bank of Greenland, la plus importante du territoire, dépasse le seuil d’un milliard d’euros de capitaux propres.

Ceci s’inscrit dans une période d’activité et de profits croissants. La “Bank of Greenland” a été fondée en 1967, par un consortium de banques danoises comprenant les “Privatbanken”, “Den Danske Bank”, “Kjøbenhavns Handelsbank”, et la “Andelsbanken”. Elle s’appuie sur Grønlands Handel (un conglomérat commercial, propriété du gouvernement groenlandais) et sur la poste groenlandaise pour assurer un service au sein des différentes communautés. (Source : SERMISIAQ-AG, 20 août 2019)

Participation d’élus groenlandais aux négociations budgétaires
du gouvernement danois

Pour la première fois dans l’histoire du Royaume, deux élus groenlandais participeront aux négociations sur le budget du gouvernement danois.

S’inscrivant dans l’optique d’une plus grande implication des élus groenlandais, ceux-ci seront appelés à défendre les dossiers prioritaires du territoire. Deux dossiers émergent : celui de la rémunération de la police au Groenland et celui du budget destiné à venir en aide à l’enfance en difficulté au Groenland. (Source : SERMITSIAQ-AG, 20 août 2019)

ISLANDE

Commémoration de la disparition du premier glacier islandais
à cause des changements climatiques

La disparition du glacier Ok a été commémorée le 18 août 2019. C’est le premier des 400 glaciers islandais à disparaître suite aux conséquences des changements climatiques.

Le 18 août 2019, une plaque commémorative intitulée « Une lettre pour l’avenir » a été inaugurée sur le site de l’ancien glacier Ok (Okjökull en islandais). Okjökull est le premier des 400 glaciers islandais à avoir perdu son statut en 2014, suite à la réduction de sa masse de glace et de neige. En 1890, le glacier Ok enregistrait 16 km² de large et 50 mètres de profondeur. En 2012, il ne s’étendait plus que sur 0.7 km² pour une profondeur de 15 mètres. La plaque indique que les 399 glaciers islandais devraient connaître le même sort dans les prochaines décennies.

La NASA a effectué plusieurs tests et expériences en Islande au mois de Juillet pour préparer une expédition sur Mars prévue en 2020

Les ressemblances de températures et minéralogiques entre l’Islande et Mars en font un lieu parfait pour effectuer les tests et expériences nécessaires à la préparation des expéditions.

Au mois de juillet 2019, la NASA a effectué une mission de trois semaines près du champ de lave de Lambahraun, situé à l’ouest de l’île, près du glacier de Langjökull. Elle a notamment testé un nouveau prototype de Rover (570 kilos, deux moteurs et quatre roues motrices). Cette mission s’est déroulée en Islande car l’île possède de nombreuses ressemblances (composition, minéralogique) avec Mars, avant que cette dernière ne se transforme en une terre dont la température moyenne est d’environ -65°C.

Ce n’est pas la première fois qu’un terrain arctique ou subarctique est utilisé pour préparer une mission ou étudier la planète Mars. Des équipes françaises partent ainsi régulièrement dans les environs de Yakutsk (République de Sakha-Yakoutie, Fédération de Russie).

Confirmation de la crainte de récession de l’Islande suite à la baisse du tourisme due à la faillite de WowAir

Pour la première fois depuis la crise de 2008, l’île, pénalisée par la faillite de la compagnie aérienne Wow Air, pourrait entrer en récession cette année.

Le 8 août, l’Institut statistique islandais a publié des chiffres confirmant le risque de récession de l’Islande pour 2019. Cette hypothèse est fortement liée à la faillite de Wow Air, qui a entraîné une baisse du nombre des visiteurs. Au second trimestre, le taux de chômage a atteint 4,4%, (soit 1,4 point de plus que les trois premiers mois de 2019), les arrivées à l’aéroport de Keflavik ont baissé de 20% sur un an, et les nuitées de 10% en moyenne.

Jean-Paul Vanderlinden (CEARC), Magali Vullierme (CEARC), Michael Delaunay (CEARC).